Chauffage et climatisation
La loi Climat résilience de 2021, en interdisant la location des logements classés E, F ou G dans le DPE jusqu’en 2034, soulève une série de défis majeurs. Ces défis sont multiples et complexes, et ils suscitent des préoccupations à divers niveaux.
L’un des obstacles majeurs à la mise en œuvre de cette loi est la solvabilité des propriétaires investisseurs. Pour effectuer les travaux nécessaires à l’amélioration de la performance énergétique de leurs biens, les propriétaires doivent disposer de ressources financières suffisantes. Cela peut être un défi, en particulier pour les petits propriétaires.
Un autre défi réside dans la fiabilité des diagnostics énergétiques et la pertinence des propositions de travaux qui en découlent. Les propriétaires doivent être en mesure de prendre des décisions éclairées sur les investissements à réaliser pour améliorer la performance énergétique de leur bien. Cela nécessite des informations précises et des recommandations adéquates.
De plus, la compétence des entreprises en bâtiment est un facteur crucial. Les travaux de rénovation énergétique doivent être réalisés par des professionnels compétents, de préférence détenant le label RGE (Reconnu Garant de l’Environnement). Cependant, ce label lui-même a fait l’objet de controverses quant à sa fiabilité, ce qui soulève des questions sur la qualité des travaux effectués.
La grande majorité des biens locatifs se trouve au sein de copropriétés. Cela ajoute une couche de complexité importante, car la prise de décision en matière de travaux de rénovation énergétique nécessite l’approbation de la communauté des copropriétaires. Les immeubles collectifs évoluent rarement dans l’urgence, et il faut souvent plusieurs années pour passer des premières discussions en conseil syndical à l’ouverture du chantier, en passant par le vote en assemblée générale. Cette période peut même s’étendre à cinq ans, en particulier dans les copropriétés moins matures, où la diversité des compétences des syndics peut jouer un rôle.
Le ministre du Logement a évoqué la possibilité de travaux privés pour échapper aux contraintes de la copropriété. Cependant, cela pourrait remettre en question le dogme de la rénovation globale. Les travaux dans les parties privatives ont des gains de performance limités par rapport aux travaux sur l’enveloppe du bâtiment. Rendre un immeuble étanche aux déperditions d’énergie nécessite d’intervenir sur la toiture, la façade, voire le mode de chauffage collectif.
En conséquence, il est peu probable que les travaux minimaux dans les parties privatives permettent de passer d’une classe énergétique G à F, et encore moins à E. De plus, encourager les gestes minimaux risque de décourager les propriétaires bailleurs d’investir dans des travaux plus importants dans l’immeuble. Ils pourraient considérer que leurs dépenses actuelles sont suffisantes et qu’ils n’ont pas besoin de réaliser d’autres travaux à l’avenir. Cette attitude pourrait affecter leur implication dans la vie de la copropriété.
Il est important de noter que la valorisation immobilière résultant de travaux de rénovation énergétique ne se produira pas avec des travaux uniquement dans les parties privatives. L’absence de travaux dans les parties communes signifie qu’il n’y aura pas de partage de la valeur si un investisseur améliore uniquement son propre bien.
De plus, si la copropriété décide ultérieurement de réaliser des travaux collectifs après que des copropriétaires bailleurs ont déjà effectué des travaux (avec ou sans leur accord), cela pourrait créer des tensions et des ressentiments. Les propriétaires pourraient estimer qu’ils ont engagé des dépenses inutiles et pourraient en vouloir aux pouvoirs publics pour les avoir incités à effectuer des travaux sans offrir de garanties en retour.
En fin de compte, l’idée du ministre est
louable dans sa tentative de trouver des solutions pour répondre aux défis de la transition énergétique. Cependant, il est important de reconnaître que ces propositions ne sont pas sans risques. Pendant que des études sont menées pour évaluer la faisabilité des travaux privés en dehors de la copropriété, il est probable que les contestations de la communauté professionnelle du secteur immobilier se feront plus discrètes.
Cependant, il existe également un risque significatif de déception parmi les bailleurs et leurs gestionnaires. Si la voie des travaux minimaux devait prospérer et concerner un nombre important de logements, elle pourrait compromettre la lisibilité de l’ambition nationale pour le parc résidentiel. Les propriétaires bailleurs pourraient se sentir désintéressés de participer à des travaux collectifs plus importants dans l’avenir.
De plus, cela pourrait entraîner une réduction de l’implication des propriétaires occupants dans l’amélioration écologique de leur immeuble, ce qui pourrait affaiblir les progrès vers des logements plus éco-responsables.
Il est essentiel que le gouvernement pèse soigneusement les avantages et les inconvénients de cette approche et assure une communication claire et transparente avec les parties prenantes du secteur immobilier. La réussite de la transition énergétique dépendra en fin de compte de la collaboration et de l’engagement de tous les acteurs impliqués.
Expert de la rénovation énergétique
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